Le Japon sous le choc après le meurtre du maire de Nagasaki
Abattu par un yakusa mardi, Itcho Ito était en guerre contre la pègre.
Par Michel TEMMAN
QUOTIDIEN : vendredi 20 avril 2007
Tokyo de notre correspondant.
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«U n attentat contre la démocratie» selon les journaux. «Un acte criminel impardonnable», a réagi Shinzo Abe, le Premier ministre japonais. L'assassinat, mardi, du maire de Nagasaki, Itcho Ito (de son vrai nom Kazunaga Ito), 61 ans, suscite une vive émotion au Japon. Et de la colère. Son meurtrier, Tetsuya Shiroo, 59 ans, maîtrisé et arrêté sur les lieux du crime, est en effet un yakusa, un mafieux, numéro 2 d'un gang du Yamaguchi-gumi, premier syndicat du crime nippon.
Forte de 39 000 hommes (parmi les quelque 92 000 yakusas recensés), cette organisation criminelle a encore pignon sur rue, malgré l'adoption en 1992 de la « loi antigang». Ses milliers d'organisations parallèles et entreprises légales forment un cartel géré comme un empire industriel tirant ses revenus de magouilles immobilières, de rackets d'entreprises, de l'exploitation des industries du jeu, du sexe ou de la gestion de sociétés de crédit... Quiconque gêne son développement met sa vie en péril.
Pacifiste. Itcho Ito, lui, avait décidé de résister à l'emprise de la pègre. Le maire de Nagasaki était un homme très apprécié. Né deux semaines après l'explosion atomique à Nagasaki, le 9 août 1945, il était devenu un ardent pacifiste militant pour l'abolition des armes nucléaires. Hier, Ban Ki-moon, le secrétaire général de l'ONU, a rendu hommage à cet «homme de paix».
Le Japon renouvelant ce dimanche ses conseils municipaux, Itcho Ito briguait un quatrième mandat, et, cette fois encore, il semblait assuré de l'emporter. Mardi, en fin d'après-midi, tout est allé très vite. A peine Itcho Ito venait-il de clore un discours face à une petite foule rassemblée devant son QG de campagne, que le gangster a surgi derrière lui, fusil en main, et tiré au moins deux coups de feu dans son dos. L'élu a été atteint. Deux balles ont transpercé son coeur. Transporté à l'hôpital dans un état désespéré, il a succombé dans la nuit de mardi à mercredi. Menacé depuis des années, le maire n'était entouré d'aucun garde du corps...
Rumeurs. L'assassinat a tout l'air d'un règlement de comptes. Dans une lettre envoyée dimanche dernier à la chaîne TV Asahi, le meurtrier aurait détaillé ses «rancoeurs» envers le maire. D'autres rumeurs, toutefois, depuis hier, font état de motivations plus politiques. Plusieurs fois, Itcho Ito avait en effet déclaré, publiquement, que des criminels de guerre ne devraient pas être honorés au mémorial de la guerre du sanctuaire de Yasukuni à Tokyo (où sont honorés quatorze criminels de guerre parmi les «morts pour la patrie» ) . Or, en 1990, l'ancien maire de Nagasaki, Hitoshi Motoshima, avait été la cible de Uyoku (l'extrême droite nippone) et blessé par balle pour avoir mis en cause les responsabilités de l'empereur Hirohito durant la Seconde Guerre mondiale. Il s'en était sorti par miracle.
Friday, April 20, 2007
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